Ces débuts d’année étant propices aux voeux, je voudrais souligner aujourd’hui, à l’adresse des personnes compétentes, s’il en existe, l’intérêt qu’il y aurait à diffuser de façon massive l’usage domestique des computeurs.
J’entends par usage domestique, l’usage individuel, personnel et privé, opposé à l’usage public : les entreprises nationalisées et autres, le Club Méditerranée, la RATP, le PMU, la DST et la TABDT disposent de computeurs ; le « Plan Calcul », organisme officiel investi des pleins pouvoirs en application de la loi du 7 novembre 1882, a décidé, c’est-à-dire a calculé scientifiquement, c’est-à-dire avec un computeur (ce qui, en bonne logique, fausse le résultat obtenu, puisque, dans ce calcul, le computeur est à la fois juge et partie), que, d’ici moins d’un lustre, le computeur sera opérationnel, social et quotidien : il donnera l’heure, tirera des chèques, réservera des places, coupera sur mesures, il servira à tout. Eh bien, j’ose le demander : pourquoi pas nous ? A l’heure où le divorce entre l’individu et la société prend des allures de plus en plus tragiques et où fleurissent de partout les psychoses, névroses et acidoses, syndromes de malaises sociaux devant lesquels la science reste souvent désarmée, comment pourrions-nous accepter que l’homme de la rue qui, sitôt franchi sa porte, peut avoir à disposition ces merveilleux outils de la technique et s’en servir à tout instant – dans le métro (vous appuyez sur un bouton et, hop, la machine vous dit quelle est la première direction à prendre, c’est fantastique !), dans les bains-douches (vous tournez une manette et hop, voilà de l’eau chaude ou froide, c’est merveilleux !) – soit, chez lui, aussi désemparé que pouvait l’être feu le père de son père ?
Certes des efforts timides ont été faits pour programmer les machines à laver et les plaques de cuissons. Mais enfin, il est grand temps que la science abandonne les cuisines : il n’y en a que pour elles et c’est tout à fait injuste.
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